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Dictionnaire Politique d'Histoire de la Santé

PNPIC

Couverture du document de la Politique Nationale de Pratiques Intégratives et Complémentaires, Ministère de la Santé du Brésil, 2006.

   La PNPIC vise à garantir le pluralisme thérapeutique dans les services de santé publics au Brésil. 

 

   La Politique nationale de pratiques intégratives et complémentaires (PNPIC) a été approuvée en 2006 par le Ministère de la Santé, afin de garantir le pluralisme thérapeutique dans le système unique de santé (SUS) – l’assistance publique de santé au Brésil – en proposant des médecines intégratives et complémentaires aux patients. Son implantation a été le fruit d’un long processus qui a débuté dans les années 1970 à partir de la politique mise en place par l’OMS encourageant l’utilisation de médecines traditionnelles. Cette directive avait pour objectif de remédier au manque de soins médicaux dans les pays en voie de développement, en stimulant l’offre de pratiques à bas coûts, peu exigeantes d’un point de vue technologique.

 

   Cette politique de l’OMS s’est vue renforcée lors de la conférence d’Alma-Ata, en 1978, qui a repris l’idée d’une santé élargie, déjà présente dans la Constitution de l’OMS en 1948. Durant cette conférence, le concept de santé, qui se basait sur l'absence de maladies, propre à la biomédecine, a été modifié au profit d’une définition axée sur un état de bien-être physique, mental et social complet, présenté comme l’un des droits fondamentaux de tout être humain. Dans cette perspective, la santé est donc liée à divers facteurs, notamment le développement économique et social, et elle requiert une participation étendue de la société ainsi qu’un fort engagement des États. Pour permettre sa réalisation, les actions proposées par l’OMS reposaient sur les soins de santé d'attention primaire, qui devaient tirer le meilleur parti des ressources allouées et des thérapeutes locaux (non biomédecins), dont le domaine d’action était étendu à la sphère alimentaire, familiale et professionnelle.

 

   Au Brésil, les politiques encouragées par l’OMS se sont heurtées au contexte de la dictature militaire (1964-1985). La crise économique qui a eu lieu durant cette période et le processus de re-démocratisation qui s’est déroulé à la fin du régime totalitaire ont remis en question la pertinence d’un modèle basé sur la rigidité des dépenses publiques et la centralisation des décisions relatives à l'offre de santé publique dans le pays. Ce processus, qui a abouti à la création du Système Unique de Santé Décentralisée (SUDS) en 1987, et plus tard à la mise en place du Système Unique de Santé (SUS) en 1988, a été favorisé par le mouvement de réforme sanitaire qui a atteint son apogée lors de la 8e Conférence Nationale sur la Santé en 1986. Cette dernière a acté la nécessité d’effectuer des changements en profondeur du système de santé brésilien, en suivant le concept de santé étendue, défendu par l’OMS. Outre la décentralisation, ces directives appelaient à une introduction de pratiques alternatives d’assistance à la santé dans le cadre des services de santé gérés par les pouvoirs publics, donnant ainsi à l’usager le droit démocratique de choisir sa thérapeutique préférée. De plus, elles préconisaient l’inclusion des savoirs concernant les pratiques alternatives dans les programmes d’enseignement médicaux. 

 

   À partir de ces réformes sanitaires et à travers une résolution datant de 1988, la commission interministérielle de planification et de coordination (CIPLAN) a intégré l’homéopathie dans les unités de santé brésiliennes en définissant des stratégies, des processus et des routines de travail. À la fin des années 1980, et durant la décennie suivante, les universités ont joué un rôle important dans la préparation des professionnels à travers des formations aux « médecines alternatives », surtout en homéopathie, en acupuncture et en phytothérapie. L'Université de Campinas (UNICAMP) dans l'État de São Paulo, par exemple, a mis en place, en 1989, une formation qui a attiré des professionnels de santé de plusieurs villes voisines. Une fois la formation rendue possible, ces alternatives thérapeutiques ont pu être exercées dans le cadre du SUS, toujours à partir d’initiatives locales, jusqu'au moment où le gouvernement de gauche du président Lula, réélu en 2006, a rassemblé les conditions politiques à la création de la PNPIC.


   La politique approuvée en 2006 a permis d’inclure l'homéopathie, l'acupuncture, la phytothérapie, le thermalisme et la médecine anthroposophique dans l’offre de santé qui devrait être proposée par les services de santé des états et des municipalités. En 2017 et 2018, d'autres modalités ont même été ajoutées aux thérapies promues par la PNPIC : l’art-thérapie, l'ayurveda, la méditation, la musicothérapie, la naturopathie, l’ostéopathie, etc. La PNPIC a ainsi ouvert un espace à l'inclusion de logiques médicales autres que la biomédecine dans le système de santé publique, contrairement à ce qui s'est passé dans d'autres pays comme la France. Néanmoins, elle se heurte encore à la résistance des professionnels de la santé et au manque d'investissements réservés à ces pratiques. Elle souffre en outre de l'absence d'inclusion d'une formation spécifique dans les universités et dépend de l'acceptation des Unités de santé de base (UBS) – centres de santé gérés par les municipalités – pour être mise en œuvre. 

   Il est important de souligner que les médecines traditionnelles, telles que les médecines indigènes et afro-brésiliennes, qui étaient la cible initiale de l'OMS, n'ont pas été incluses dans la politique. Cependant, elles ont fait l'objet d'une attention croissante de la part des organismes responsables du développement des pratiques intégratives et complémentaires au Brésil.

 

Prolonger la lecture sur le dictionnaire : Droit aux soins - Ayurveda - Homéopathie

Renata Palandri Sigolo - Universidade Federal de Santa Catarina (Brésil)

Références :

Nelson Felice de Barros, A construção da medicina integrativa, São Paulo, Hucitec, 2008.

Gisléa Cândida Ferreira da Silva, et al. « Política Nacional de Práticas Integrativas e Complementares: trajetórias e desafios em 30 anos de SUS », Physis: Revista de Saúde Coletiva, Rio de Janeiro, v. 30(1), 2020, p.1-25. Disponible en ligne.


Pour citer cet article : Renata Palandri Sigolo, « PNPIC », dans Hervé Guillemain (dir.), DicoPolHiS, Le Mans Université, 2024. 

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