Les régates à Evian, Agence Roll, 1906.
Évian est une ville avant tout connue pour son eau minérale et sa cité thermale. Cependant elle est aussi le lieu où ont été signées la fin de la Guerre d’Algérie et la proclamation d’Indépendance de l’Algérie, le 19 Mars 1962, entre la République Française et les membres algériens du FLN (Front de libération nationale). Pourquoi un acte politique aussi important a-t-il pris place dans cette petite ville de Haute-Savoie ?
Du fait de sa situation - au bord du lac Léman et au pied du massif des Alpes, Évian est une cité idéale en matière de thermalisme. Les thermes et l’eau minérale d’Evian ont été valorisés selon un processus classique : d'abord découverts par un aristocrate, puis promus par les médecins et enfin privatisés par un propriétaire, Monsieur Cachat. Le premier, Jean-Charles de Laizer, en parle à son médecin, Samuel Tissot (Lausanne), un praticien des plus réputés en Europe qui prescrit des séjours dans ces thermes à ses patients. A la fin de la Restauration, se mettent donc en place une cité thermale et un site d’exploitation commerciale de l’eau d’Évian. Alors que l’hydrothérapie prend son essor dans le champ médical – dans les années 1860, l’eau minérale est approuvée par l’Académie de Médecine, l’eau d’Évian est vendue en pharmacie, avant d’être commercialisée en grande surface à partir des années 1960.
C’est à cette époque que la ville, déjà devenue une marque, est liée à l’histoire politique. Les accords d’Évian du 19 Mars 1962 mettent fin à la guerre d’Algérie. La guerre durait depuis le 1er novembre 1954, après que des membres du FLN ont perpétué la « Toussaint Rouge » en manifestant et en commettant plusieurs attentats contre la présence française en Algérie. En ce mois de mars 1962, les représentants de la République française et ceux du FLN représentant l’Algérie indépendante se retrouvent à Évian. L’explication est simple : les représentants algériens sont alors réfugiés en Suisse (pays neutre) et Évian, située à la frontière, est une ville thermale qui permet de disposer de nombreux hôtels pour loger les acteurs politiques. Ces accords mèneront à la fin de la guerre d’Algérie et surtout à l’indépendance algérienne, qui fut sous domination française de 1830 à 1962.
En réalité, ce n’était pas la première fois qu’Évian accueillait de telles conférences politiques. En juillet 1938, la cité thermale est le lieu de la Conférence d’Évian, organisée par Franklin D. Roosevelt pour les réfugiés juifs fuyant le régime nazi et émigrant vers les États-Unis. Surnommée la « conférence de la honte », car elle survient après « l’Anschluss », rattachement de l’Autriche au IIIe Reich, la conférence se déroule à l’Hôtel Royal d’Évian, surplombant le lac Léman.
Que reste-t-il de ces édifices marqués par une longue histoire diplomatique ? L’architecture et le patrimoine d’Évian sont typiques des villes thermales. La ville est composée de parcs, de différentes sources, d’un casino qui, notamment, s’inspire de l’architecture de l’Église Sainte-Sophie d’Istanbul. En matière d’architecture, Évian possède de nombreuses demeures bourgeoises construites sous la volonté de riches familles aristocratiques. Une de ces plus remarquables constructions est sans doute le château de Fonbonne. De plus, la commune d’Évian est pourvue d’un funiculaire (inscrit au Monument Historique), unique en France étant donné qu’il dessert six stations. Cette prouesse technique permet aux touristes d’aller sur les hauteurs d’Évian, paisiblement et sans effort.
Référence :
Charles-Robert Ageron, “Les accords d'Évian (1962)”, Vingtième Siècle. Revue d'histoire, 1992, 3/35, p. 3-15.
Pour citer cet article : Guillaume Pichois, "Évian", dans Hervé Guillemain (dir.), DicoPolHiS, Le Mans Université, 2021.